Crise dans les liens familiaux et prise en charge psycho-sociale : le cas des « enfants-sorciers »

¹ Psychiatre au Département de Psychiatrie de l’Université de Kinshasa et la Clinique Psychiatrique Universitaire (CNPP) de Kinshasa, responsable Association pour des Projets Psycho-Sociaux Kinshasa, République Deemocratique du Congo
² Psychiatre, psychanalyste et analyste de groupe; consultant sur les systèmes et soins de santé mentale et interventions psychosociales dans les pays en développement, Bierbeek, Belgique , conseiller technique HealthNet TPO, Pays Bas

^* nsituad@yahoo.fr
^** jaakleroy@yahoo.com ; jaak.leroy@hntpo.org

Résumé

Les structures officielles psychiatriques et des soins de santé en général éprouvent des difficultés dans l’organisation d’une prise en charge adéquate des enfants sorciers. Ce phénomène apparu à la fin des années 80 constitue un fléau dans la Ville de Kinshasa en République Démocratique du Congo et n’a pas été contenu par des offres d’assistance des organisations non gouvernementales basées surtout sur la protection physique de l’enfant isolé ainsi du milieu familial, et aussi par les mesures de protection judiciaire. La recherche des raisons possibles à cette situation a conduit les auteurs aux lieux où sont adressées ces types de souffrances. L’analyse minutieuse de la demande des familles et des interventions thérapeutiques des prophètes guérisseurs montrent clairement, à travers les interventions illustrées par deux cas, que la sorcellerie d’enfant est un discours social destiné à canaliser les angoisses collectives liées aux différentes crises et qui permet de mettre en scène particulièrement la crise des liens familiaux. Celle-ci place l’enfant dans une situation d’intermédiaire nécessaire pour la reconstruction de ces liens. Les auteurs suggèrent dans une démarche en cours d’exécution de nouvelles stratégies de prise en charge psychosociale avec une approche familiale et communautaire et une mise en place du modèle de ce dispositif dans un réseau de divers intervenants.

Abstract

General psychiatric and health care official structures have difficulty in organizing adequate care of child sorcerers. This phenomenon appeared in the late 80s is a curse in the city of Kinshasa in the Democratic Republic of Congo and was not controlled with offers of assistance by nongovernmental organizations based primarily on the physical protection of the isolated child and the family environment, neither by the measures of judicial protection. The search for possible reasons for this situation led the authors to places where these types of suffering are referred. Careful analysis of families demand and therapeutic interventions of healers prophets clearly demonstrates, through interventions illustrated by two cases, that child sorcery is a social discourse intending to channel collective anxieties related to the various crises and allowing to stage particularly the crisis of family links. This places the child in an intermediate situation necessary for the reconstruction of these links. The authors suggest, through a running process, new psychosocial treatment strategies with a family and community approach and implementation of this model measure in a network of different participants.