« Même si nous n’entendons pas, nous avons les moyens de comprendre nos enfants ». Analyse du vécu subjectif des modes de communication (parents sourdssigneurs et enfants entendants) dans des familles camerounaises

Maître de Conférences. Département des Sciences de l’Education, ENS, Université de Yaoundé I,-Cameroun. Psychologue clinicienne, Psychopathologue Boite postale 7580 Yaoundé – Cameroun

^* emilietchoko@yahoo.fr/emilie.tchokote@univ-yaounde1.cm

Résumé

En situation de surdité, la réception des affects et des cognitions chez la personne sourde est assurée par la vision et rendue possible par la gestualité. L’étude s’intéresse au vécu subjectif des modes de communication (parent sourd-signeur- enfant entendant). Trois familles rencontrées dans leur domicile respectif ont accepté de participer à l’étude. L’entretien clinique de recherche a été mené avec l’appui d’un psychologue et interprète de la langue des signes. A travers l’analyse thématique de contenu, les résultats révèlent que le vécu d’une faille dans les modes de communication est comblé précocement par les parents afin d’éviter le risque d’appauvrissement des échanges et contacts corporels avec leur enfant. La confrontation de la déficience et de la différence du parent établie très tôt chez le jeune enfant, fait face désormais au malaise psychique à l’âge développemental plus avancé. Le lien parent sourd-enfant entendant gagnerait à être renforcé à travers la facilitation d’un étayage de la structure intersubjective sur celle intrapsychique lors d’un travail psychothérapeutique approfondi. Celui-ci est susceptible d’entretenir la place du sujet singulier dans une dynamique de l’ensemble intersubjectif du groupe famille.

Abstract

In situation of deafness, the reception of affects and cognitions in the deaf person is ensured by vision and made possible by gestures. The study focuses on the subjective experience of modes of communication (deaf signing parent – hearing child). Three families met in their respective homes agreed to take part in the study. The clinical research interview was conducted with the assistance of a psychologist and sign language interpreter. Through thematic content analysis, the results reveal that the parents’ experience of a communication gap is filled early to avoid the risk of impoverishing parent-child exchanges and body contact with their child. The confrontation of the parent’s deficiency and his difference gradually established by the young child, now faces the psychic discomfort felt once the child reaches advanced developmental age. The deaf parent-hearing child bond would benefit from being strengthened through the facilitating support for the intersubjective structure on the intrapsychic structure during psychotherapeutic work. This is likely to maintain the place of the singular subject in an intersubjective family group dynamic.