Il est ici question de ce que l’on pourrait nommer « les pratiques actuelles de la psychanalyse », nomination qui entre sciemment en confrontation avec le discours ambiant, général ou « expertal » qui vise à nous faire croire depuis de nombreuses années, à la dimension « inactuelle » de la psychanalyse.

C’est au cœur de cette tension quotidiennement repérable et palpable dans les institutions de soins ou socio-éducatives, que ce numéro 57 a voulu retracer des expériences pratiques élaborées et qui témoignent de cliniques singulières qui s’exercent au vif de zones transférentielles extrêmes et qui, surtout, n’en finissent pas d’émerger justement dans ce temps féroce où la psychanalyse, pourtant, semble regagner du terrain, notamment dans des lieux de soins ou dans le champ du travail social où les institutions (hôpital, ASE etc) s’avouent « débordées », « dépassées ». Ces sentiments s’expriment aujourd’hui largement, impasses concrètes et quotidiennes, dont témoignent les dysfonctionnements institutionnels majeurs actuels (manque de soins et de soignants, de lieux et de personnels d’accueil, violences et passages à l’acte récurrents et exacerbés, …)

Qu’en est-il de la psychanalyse à l’horizon de la subjectivité de notre époque ? dans ces lieux vides du lien social et du sujet ?

Quelle pratique de résistance peut figurer la psychanalyse lorsqu’elle s’exerce dans des espace-temps meurtris parfois au point de voir s’anéantir les conditions mêmes de la possibilité d’un sujet devenant alors elliptique, discontinu, précaire, inconstant, tout comme la figure de l’Autre s’emplit de vide et se spécifie de n’être plus secourable ?

Les textes réunis et accueillis dans ce numéro de Psychologie Clinique ont pour projet de penser ces questions de résistances, celles qui consistent en des pratiques qui continuent de s’orienter de l’éthique du sujet, du transfert, du désir et de la temporalité logique, ces expériences novatrices de ne pas céder sur l’hypothèse de l’inconscient, sur la persistance du sujet, car si « le sujet est rare », il est du devoir de la psychanalyse d’en repenser la dimension éminemment politique.

Chaque texte va ainsi s’inscrire dans une rencontre entre le discours psychanalytique et les variations du fait socio-politique et insister sur la nécessité d’une logique à contre-courant, fidèle à la dimension subversive intemporelle de la psychanalyse, au fait de la rencontre toujours manquée, certes, avec le fait socio-politique et pourtant toujours à inventer, nécessairement, au fondement de ces pratiques éthiques et actuelles.

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